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Info
Pietro Sarto est né un 13 juin. En 1930, cela tombait sur un vendredi ! Cette superstition amuse d’autant plus Pietro Sarto qu’il est un esprit fort, au sens où l’entendaient jadis les contempteurs de l’insoumission. A 80 ans, la chevelure de notre flamboyant artiste saint-preyard est toujours celle d’un anar. Elle s’est joyeusement blanchie et son regard noir s’est adouci au feu de l’amitié: «Créer ne consiste pas seulement à faire des tableaux, mais à créer des liens.»
L’artiste se souvient de son enfance à Neuchâtel, au début de la Guerre. Son accent tessinois suscitant des moqueries xénophobes, il défia tout le monde en se faisant sauvageon. Il a toujours été inapte aux études, mais l’école buissonnière l’a rendu autodidacte: «J’ai appris tout seul le français en lisant les livres universitaires de mes deux frères qui étaient beaucoup plus âgés que moi. Je n’allais plus en classe mais je passais quand même les examens; je n’ai jamais redoublé.» A vrai dire, l’élève avait un caractère tellement insupportable que les instituteurs neuchâtelois acceptèrent sotto voce ce curieux compromis. Moins accommodants, ceux de l’Ecole de commerce de Lausanne l’expulseront en 1948 pour indiscipline. Avec les profs obséquieux de l’Ecole des Beaux-arts de la même ville, ce fut pire: «Ils n’ont pas supporté que je proclame ma préférence pour les peintures de Raphaël par rapport à l’art contemporain…»
Cela ne l’empêchera aucunement de devenir le disciple de Marcel Poncet, de Rodolphe Bosshard et d’Albert Yersin, maître du cuivre, qui l’enverra à Paris à la rencontre d’un Gaston Bachelard, et d’un autre savant, Albert Flocon, artiste, poète et génie en mathématiques: «Il m’a initié à la théorie des perspectives curvilignes. On reconsidère le monde en courbes plutôt qu’en rectangles. Si on photographie le ciel à partir du fond d’une cuvette, on obtient une image grand angle appelée œil de poisson. En architecture, cela donne la Géode, au parc de la Villette. Sur la toile, un cercle universel qui nous permet d’être, non pas devant un tableau, mais dedans.» D’où la sensation de vertige qu’on éprouve en admirant les peintures et les gravures de Sarto, avant de faire le pas…
Mais en artiste artisan, il préfère l’art au langage de l’art. Il se méfie de la posture intellectualisante de l’artiste. Et de paraphraser un Jean Cocteau parlant de l’amour: «Les mots de la culture ne signifient plus rien, ils sont usés; il ne reste que des preuves de la culture.»
Gilbert Salem, Pietro Sarto dans l'oeil d'un poisson, article paru dans 24h à l'occasion de la retrospective du peintre à Payerne 2008.
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Bio
Bibliographie:
Claude Ritschard, Pietro Sarto, perspectives empiriques, étude avec des textes de Freddy Buache et Rainer Michael Mason. Ed. Au Verseau (1986).
Françoise Simecek, Pietro Sarto, les estampes 1947-1992, catalogue raisonné des gravures et lithographies, avec des textes de Florian Rodari, Jon Goodman, Albert Flocon et Rainer Michael Mason. Co-édition Fondation William Cuendet & Atelier de Saint-Prex ; Cabinet des estampes de Genève ; Françoise Simecek (1992)
Alphonse Laya, Pietro Sarto, homme de métier (entretiens), La Bibliothèque des Arts (2003).
Figures de la métamorphose, suivi d’un Essai sur Pietro Sarto. La Bibliothèque des Arts (1999), et qui le cite, avec d'autres artistes, dans son livre Le Désir de Dieu (2005)
Publications de l'Association des amis du peintre.
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